La cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad (Saints Pierre et Paul)

La cathédrale syriaque-orthodoxe Mar Petros et Paulos se situe à 33°18’46.98″N. 44°26’26.02″E. et 39 mètres d’altitude.  Elle est au centre de Bagdad, sur le versant oriental du Tigre.

Consacrée aux apôtres Saint Pierre et Saint Paul, la cathédrale Mar Petros et Mar Paulos a été consacrée le 09 mai 1964 par le patriarche Mar Ignatius (Ignace) YACOUB III. Sa construction fut rendue possible grâce à la donation du grand mécène Abdul Majid ZAYOUNA.

Depuis l’émergence du fondamentalisme islamiste et la chute du régime du régime de Saddam Hussein, la cathédrale Mar Petros et Mar Paulos a été visée par deux attentats à la voiture piégée.

La cathédrale Mar Petros et Mar Paulos est une grande et large église qui occupe une surface de plus de 1800m², orientée vers le Nord-Est. Elle se présente comme une grande halle, dénuée de colonnes et piliers internes, que surmonte un plafond élevé à deux pans inclinés.


Photo : Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Intérieur. Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA

Localisation

La cathédrale syriaque-orthodoxe Mar Petros et Mar Paulos se situe à 33°18’46.98″N. 44°26’26.02″E. et 39 mètres d’altitude.

Elle est au centre de Bagdad, sur le versant oriental du Tigre, dans le quartier Al Wahda, rue Al Sinaa (rue de l’industrie).

Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Parvis.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA

Aux origines de l’Eglise syriaque-orthodoxe

C’est à Antioche, vers l’an 38 / 50  que naquit l’Église et que les disciples du Christ reçurent pour la première fois le nom de chrétien. Antioche était alors la capitale de la province syrienne de l’Empire romain. Les chrétiens de cette province romaine qui s’étendait de la Méditerranée aux frontières de la Perse furent appelés « syriaques » ou « syriens ».  Antioche devint le lieu central du christianisme de la Syrie romaine et du Moyen-Orient, abritant une des trois écoles théologiques de la chrétienté, les autres se trouvant à Alexandrie et Constantinople. Ses fondements théologiques reposaient essentiellement sur la philosophie d’Aristote, alors qu’Alexandrie avait plutôt développé le courant platonicien.

Face à la dominante politique et culturelle gréco-romaine, Antioche en lien avec la grande cité d’Edesse (aujourd’hui Ourfa, en Turquie) développèrent un christianisme de langue et de culture syriaques qui se répandit progressivement dans toute la Mésopotamie. Si la tradition syriaque attribue l’évangélisation de la Mésopotamie à l’apôtre Thomas et à ses disciples Addaï et Mari, « il semble qu’en réalité l’introduction du christianisme remonte seulement au début du IIe siècle et qu’elle ait été l’œuvre de missionnaires judéo-chrétiens venus de Palestine[1] ». Ce christianisme mésopotamien se structura à Séleucie-Ctésiphon, sur les bords du Tigre, à 30 km au sud de Bagdad, où la tradition indique que Saint Thomas s’y arrêta au cours de son voyage vers l’Inde. C’est là, sur une colline du faubourg de Koghé, que fut bâtie la première église patriarcale de l’Église de Mésopotamie et que fut établit son catholicossat. Ce christianisme des origines de langue syriaque constitue encore de nos jours le socle commun des églises locales irakiennes et de leurs communautés qui en perpétuent l’héritage et la transmission.

Ce socle commun fut progressivement fractionné en une pluralité d’églises, dès les premiers conciles et jusqu’au XXe siècle pour des raisons géopolitiques et christologiques.

Ainsi, le premier concile œcuménique de Nicée, en 325, convoqué par l’empereur romain Constantin Ier se tint en l’absence des évêques de Perse, à l’exception de Jacques de Nisibe, car « il était impossible aux autres pasteurs, en période de guerre permanente ou presque, d’aller siéger dans une assemblée tenue en pays ennemi, convoquée par l’empereur romain et, qui plus est, présidée par lui.[2] ». Il faut dire que dès la conversion Constantin Ier au christianisme, l’empereur sassanide Shapour II passa de la tolérance à la méfiance vis à vis des chrétiens de Perse. Cette méfiance se mua en hostilité, les églises furent détruites et le clergé fut persécuté. « Le but de la persécution n’est pas d’anéantir les chrétiens, mais de les amener à apostasier, une fois la hiérarchie décimée.[3] »

Un siècle plus tard, en 431, le Concile d’Éphèse condamna le patriarche de Constantinople Nestorius défenseur des deux natures coexistant en Christ : l’une divine, fils de Dieu, l’autre humaine fils de Marie. Cette doctrine christologique fut jugée hérétique et Nestorius fut déposé. Les rivalités géopolitiques entre l’empire romain et l’empire perse sassanide aidant, le nestorianisme fut adopté dans la seconde moitié du Ve siècle par l’Eglise de l’Orient et se répandit ainsi en Mésopotamie, en Perse et jusqu’en Inde.

Vingt ans plus tard, en 451, au Concile de Chalcédoine, se déroula une nouvelle controverse christologique. Les Églises syrienne, égyptienne, éthiopienne et arménienne furent accusées de défendre une doctrine monophysite, selon laquelle la nature divine du Christ aurait absorbée sa nature humaine et que le Christ n’aurait en définitive qu’une seule nature, divine. Cette doctrine dénoncée aboutit à un nouveau schisme et les églises concernées, soucieuses de préserver leurs intérêts géopolitiques propres, devinrent autocéphales.

Au VIe siècle, le moine syrien Jacques Baradaï, réorganisa l’église syriaque. Après son ordination épiscopale, il entreprit un grand voyage dans toutes les régions syriaques pour ordonner nombre d’évêques, de prêtres et de diacres. C’est en son honneur qu’on qualifiera l’Église Syriaque de  « Jacobite ».  Il est de fait le fondateur de l’église syriaque-orthodoxe.

Coupée du christianisme occidental des siècles durant, l’Église syriaque-orthodoxe parvint à se développer dans des situations souvent complexes, comme l’apparition de l’islam, les conquêtes arabes, le califat abbasside du VIIIe au XIIIe siècles, les invasions mongols, la chute de Constantinople au XVe siècle et la domination turque-ottomane.

Au long des siècles, l’Église syriaque-orthodoxe se fixa principalement dans l’actuelle sud-est de la Turquie (le Tur Abdin), l’est de la Syrie et l’Irak, développa un courant ascétique et monacal très important, dressa des évêchés, et parvint à survivre aux razzias mongols au XIIIe siècle avant de connaître son propre schisme au XVIIIe siècle qui donna naissance à l’Eglise syriaque catholique rattachée à Rome.

Un point de rupture eût lieu en 1915-1917. Les Syriaques du Tur Abdin furent victimes du génocide des Arméniens et massacrés comme eux par les Turcs et les Kurdes. Nombre de rescapés s’installèrent en Mésopotamie irakienne, à Mossoul et dans la plaine de Ninive où préexistaient des communautés syriaques, ainsi qu’à Bagdad où ils vinrent surtout dans les années 60. Tout au long du XXe siècle, nombre de fidèles syriaques-orthodoxes originaires de Turquie, du Liban, de Syrie et d’Irak ont également émigré au delà de l’Orient et ont recréé des communautés en Europe, aux États-Unis et en Australie.

[1] In « Vie et mort des chrétiens d’Orient. Des origines à nos jours », Jean-Pierre Valogne, Fayard, Mars 1994, p.737

[2] In « Histoire de l’église de l’Orient », Raymond Le Coz, Le Cerf, Septembre 1995, p. 31.

[3] In « Histoire de l’église de l’Orient », Raymond Le Coz, Le Cerf, Septembre 1995, p. 33.

Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Tableau de la crucifixion du Christ.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Croix glorieuse brodée sur le rideau du sanctuaire.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Couverture dorée et martelée de l'évangéliaire représentant le Christ crucifié.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Croix syriaque dans un manuscrit liturgique.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Croix repeinte du dôme.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Boîte à offrandes avec croix.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA

Histoire d’une construction

Consacrée aux apôtres Saint Pierre et Saint Paul, la cathédrale Mar Petros et Mar Paulos a été construite entre 1962 et 1964 et consacrée le 09 mai 1964 par le patriarche Mar Ignatius (Ignace) YACOUB III.

Sa construction fut rendue possible grâce à la donation du grand mécène Abdul Majid ZAYOUNA.

Depuis la recréation de l’archevêché syriaque-orthodoxe de Bagdad au début du XXe siècle, 3 archevêques se sont succédés : Mar Gregorius PAULOS BEHNAM, Mar Severios ZAKKA IWAS qui deviendra le patriarche Zakka Ier IWAS et enfin depuis 1980 Mar Severios HAWA l’actuel archevêque de Bagdad.

Depuis l’émergence du fondamentalisme islamiste et la chute du régime du régime de Saddam Hussein, la cathédrale Mar Petros et Mar Paulos a été visée dans les années 2000 par deux attentats à la voiture piégée qui n’ont heureusement pas fait de victimes.

Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Stèles commémoratives du mécène Abdul Majid Zayouna.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Autel décoratif.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA

Description de la cathédrale

Construite par l’ingénieur Joseph JARJIS, la cathédrale Mar Petros et Mar Paulos est une grande et large église qui occupe une surface de plus de 1800m², orientée vers le Nord-Est. Elle se présente comme une grande halle, dénuée de colonnes et piliers internes, que surmonte un plafond élevé à deux pans inclinés.

Résolument moderne, la cathédrale Mar Petros et Mar Paulos préserve les 3 parties fondamentales de l’architecture syriaque : l’église basse pour le peuple (la nef), l’église médiatrice pour les diacres qui chantent la gloire du Seigneur (le chœur) et l’église haute pour les prêtres et les évêques (le sanctuaire).

Le sanctuaire de la cathédrale est séparé de la nef et du chœur par une porte-royale à 4 colonnes, équipée de grands rideaux brodés de croix glorieuses, que l’on ouvre ou que l’on ferme au gré des temps liturgiques.

Au centre, devant le sanctuaire, sur le Golgotha est posé un magnifique évangéliaire recouvert d’une plaque dorée et martelée représentant le Christ crucifié.

Le sanctuaire est équipé de 3 autels. Le maître-autel à degrés orienté vers le Levant est adossé à l’abside. Il est surmonté d’un grand tableau de la crucifixion du Christ. Deux autels latéraux très sobres sont situés dans les bas-côtés.

Le centre du sanctuaire est couronné d’un dôme en forme de bulbe, symbole de la voûte céleste, au dessus du maître-autel.

De part et d’autre du sanctuaire se trouvent deux pièces, la sacristie à gauche et le baptistère à droite. Leurs portes sont surmontées de deux immenses tableaux identiques sur lesquels sont inscrits en arabe le Credo de Nicée-Constantinople.

Au-dessus de la porte droite, sous le Credo est inscrit cet extrait de l’évangile de Saint Marc, 16, 16 : « Celui qui croira et qui sera baptisé sera sauvé, mais celui qui ne croira pas sera condamné ». Au-dessus de la porte gauche, sous le Credo est inscrit cet extrait de l’évangile de Saint Jean, 15, 26/2: «L’Esprit de vérité qui vient du Père, il rendra témoignage de moi. »

Au milieu, sur le linteau de bois de la porte royale a été gravé dans toute sa longueur le « Notre Père » par l’artiste Abdel GHAFFAR MAL’ALLAH, en 1982.

De très beaux lustres accrochés au plafond illuminent l’église. Les murs latéraux sont percés de fenêtres à vitraux qui favorisent la pénétration de la lumière naturelle du lever au coucher du soleil.

Plusieurs tombes sont présentes dans la cathédrale. Parmi celles-ci, on peut voir celle de Mar Gregorius PAULOS BEHNAM décédé en 1969, mais aussi celle du père Youssef Adel Aboudi assassiné le 5 avril 2008.

Sur le mur gauche de l’église on peut également lire 3 plaques commémoratives identiques en anglais, arabe, syriaque, en mémoire du grand mécène Abdul Majid ZAYOUNA. Sa tombe se trouve dans la cour de la cathédrale.

Dans le fond de l’église, a été érigé une tribune qui occupe toute la largeur de l’édifice.

Un clocher tour se dresse au sud-ouest de l’édifice.

Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Intérieur : nef, chœur et sanctuaire.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Abouna Nahmet al Khoury Benyamin al Qas, curé de la cathédrale, devant l'ambon.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Rideau du sanctuaire devant lequel est présenté l'évangéliaire sur son ambon.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Évangéliaire avec sa couverture martelée.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Sanctuaire : l'autel et son mobilier décoratif surmonté d'un tableau de la crucifixion du Christ.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Autel dans le bas-côté droit.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Bas-côté droit : crédo de Nicée en arabe et syriaque, avec extrait de l'évangile selon Saint Marc,16,16.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Bas-côté gauche : crédo de Nicée en arabe et syriaque, avec extrait de l'évangile selon Saint Jean,15,26/2.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Sur le linteau de la porte royale est gravé le "Notre-Père".
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Lustres.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Vitrail.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Stèle funéraire de Mar Gregorius Paulos Behnam.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Stèles funéraires.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA

Équipements et installations importantes complémentaires

À côté de la cathédrale Mar Petros et Mar Paulos, l’archevêché syriaque-orthodoxe a été construit en 1975 à l’époque du patriarche Mar Ignatius Zakka IWAS, qui fut auparavant l’évêque de Bagdad et auquel a succédé l’actuel évêque titulaire Mar Severios HAWA.

En face de la cathédrale se trouve également un édifice moderne pour loger les prêtres, ainsi qu’une salle de 320m² au nom du patriarche BARSOM, utilisée pour les activités et les évènements religieux et sociaux.

Un autre bâtiment neuf jouxte l’archevêché. Conçu par l’ingénieur Bassim Matti al Qas, son architecture est très originale. Il ressemble à un dôme posé à même le sol. À l’intérieur, dans une ambiance lumineuse atténuée, propre à la prière se trouve une belle petite chapelle.

Deux autres bâtiments adjacents abritent une université scientifique.

 

Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Parvis de la cathédrale et archevêché au fond de la cour.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Chapelle.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Cathédrale Mar Petros et Mar Paulos de Bagdad. Intérieur de la chapelle.
Mars 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA

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