L’église syriaque-orthodoxe Mar Touma de Mossoul

L’église syriaque-orthodoxe Mar Touma se situe à 36°20’27.0″N 43°07’31.5″E et 234 mètres d’altitude, dans le vieux Mossoul autrefois délimité par les remparts ottomans, sur la rive occidentale du Tigre, face à l’antique Ninive.

La tradition indique que l’église syriaque-orthodoxe Mar Touma de Mossoul fut érigée sur le lieu-même où se trouvait la maison où Saint Thomas aurait reçu l’hospitalité au cours de son voyage vers l’Inde. L’édifice aujourd’hui visible au cœur de la vieille ville devait se trouver à l’origine hors des murs primitifs de Mossoul bâtis en 640. Son histoire est d’autant plus complexe qu’elle fut construite par étapes successives aux VIIe, XVIIIe et XIXe siècles.

Plus qu’une église, il s’agit d’un ensemble architectural complexe à 5 nefs constitué de deux voire de trois églises parallèles délimitées par des arches à colonnes octogonales.

La continuité et l’unité de cet ensemble architectural tripartite sont assurées par le sanctuaire qui s’étire sans séparation du nord vers le sud. Au total, 8 portes saintes séparent la quintuple nef du sanctuaire.


Photo : Église syriaque-orthodoxe Mar Touma de Mossoul. Nef de 1848 et porte royale de 1648. Avril 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA

Plan de l’Eglise syriaque-orthodoxe Mar Touma de Mossoul © In « Les chrétiens de Mossoul et leurs églises pendant la période ottomane de 1516 à 1815 », Fr. Jean-Marie Mérigoux, o.p. Mossoul-Ninive, 1983, p.111 A.

Plan monument

Location

L’église syriaque-orthodoxe Mar Touma se situe à 36°20’27.0″N 43°07’31.5″E et 234 mètres d’altitude, dans le vieux Mossoul autrefois délimité par les remparts ottomans, sur la rive occidentale du Tigre, face à l’antique Ninive, à 400 kilomètres au nord de Bagdad. L’église est établie « à la limite du quartier al-gulaq et du quartier hazrag, aujourd’hui proche du carrefour de la rue Faruq et de la rue de Ninive[1]».

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[1] In « Les chrétiens de Mossoul et leurs églises pendant la période ottomane de 1516 à 1815», Fr. Jean-Marie Mérigoux, o.p. Mossoul-Ninive,1983, p.104

Mossoul-centre après la guerre.
Avril 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA

Aux origines de l'église syriaque-orthodoxe

Si la tradition syriaque attribue l’évangélisation de la Mésopotamie à l’apôtre Thomas et à ses disciples Addaï et Mari, « il semble qu’en réalité l’introduction du christianisme remonte seulement au début du IIe siècle et qu’elle ait été l’œuvre de missionnaires judéo-chrétiens venus de Palestine[1] ». Ce christianisme mésopotamien se structura à Séleucie-Ctésiphon, sur les bords du Tigre, à 30 km au sud de Bagdad, où la tradition indique que Saint Thomas s’y arrêta au cours de son voyage vers l’Inde. C’est là, sur une colline du faubourg de Koghé, que fut bâtie la première église patriarcale de l’Église de Mésopotamie et que fut établit son catholicossat. Ce christianisme des origines de langue syriaque constitue encore de nos jours le socle commun des églises locales irakiennes et de leurs communautés qui en perpétuent l’héritage et la transmission.

Ce socle commun fut progressivement fractionné en une pluralité d’églises dès le concile de Nicée au IVe siècle et jusqu’au XXe siècle pour des raisons souvent bien plus géopolitiques que christologiques.

Ainsi, le premier concile œcuménique de Nicée, en 325, convoqué par l’empereur romain Constantin Ier se tint en l’absence des évêques de Perse, à l’exception de Jacques de Nisibe, car « il était impossible aux autres pasteurs, en période de guerre permanente ou presque, d’aller siéger dans une assemblée tenue en pays ennemi, convoquée par l’empereur romain et, qui plus est, présidée par lui.[2] ». Il faut dire que dès la conversion Constantin Ier au christianisme, l’empereur sassanide Shapour II passa de la tolérance à la méfiance vis à vis des Chrétiens de Perse. Cette méfiance se mua en hostilité, les églises furent détruites et le clergé fut persécuté. « Le but de la persécution n’est pas d’anéantir les chrétiens, mais de les amener à apostasier, une fois la hiérarchie décimée.[3] »

Un siècle plus tard, en 431, le Concile d’Éphèse condamna le patriarche de Constantinople Nestorius défenseur des deux natures coexistant en Christ : l’une divine, fils de Dieu, l’autre humaine fils de Marie. Cette doctrine christologique fut jugée hérétique et Nestorius fut déposé. Les rivalités géopolitiques entre l’empire romain et l’empire perse sassanide aidant, le nestorianisme fut adopté dans la seconde moitié du Ve siècle par l’Église de l’Orient et se répandit ainsi en Mésopotamie, en Perse et jusqu’en Inde.

Vingt ans plus tard, en 451, au Concile de Chalcédoine, se déroula une nouvelle controverse christologique. Les Églises syrienne, égyptienne, éthiopienne et arménienne furent accusées de défendre une doctrine monophysite, selon laquelle la nature divine du Christ aurait absorbée sa nature humaine et que le Christ n’aurait en définitive qu’une seule nature, divine. Cette doctrine dénoncée aboutit à un nouveau schisme et les églises concernées, soucieuses de préserver leurs intérêts géopolitiques propres, devinrent autocéphales.

Au VIe siècle, le moine syrien Jacques Baradaï, réorganisa l’église syriaque. Après son ordination épiscopale, il entreprit un grand voyage dans toutes les régions syriaques pour ordonner nombre d’évêques, de prêtres et de diacres. C’est en son honneur qu’on qualifiera l’Église syriaque de  « Jacobite ».  Il est de fait le fondateur de l’église syriaque-orthodoxe, qui fut coupée du christianisme occidental des siècles durant, se développa dans des situations souvent complexes et survécut jusqu’à nos jours dans en dépit d’événements critiques (apparition de l’islam, conquêtes arabes, califat abbasside du VIIIe au XIIIe siècles, invasions mongols, chute de Constantinople au XVe siècle, domination turque-ottomane, génocide Jeune-Turc en 1915-1918,  persécutions islamico-mafieuses au début du XXIe siècle).

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[1] In « Vie et mort des chrétiens d’Orient. Des origines à nos jours », Jean-Pierre Valogne, Fayard, Mars 1994, p.737

[2] In « Histoire de l’église de l’Orient », Raymond Le Coz, Le Cerf, Septembre 1995, p. 31.

[3] In « Histoire de l’église de l’Orient », Raymond Le Coz, Le Cerf, Septembre 1995, p. 33.

Croix d'époque sassanide (IIIe-VIIe siècle).
Avril 2018 © Musée de Bagdad
Croix d'époque sassanide (IIIe-VIIe siècle).
Avril 2018 © Musée de Bagdad

Fragments d’histoire chrétienne de Mossoul[1]

Mossoul « reste une métropole chrétienne[2] », ce qu’atteste l’ensemble de son histoire et de son patrimoine ancien et contemporain, en dépit d’une actualité catastrophique.

Si le premier évêché y est attesté en 554[3], il faut aussi tenir compte de la tradition apostolique paléochrétienne. « C’est ainsi que trois églises se glorifient d’avoir eu chacune pour fondation une maison où un apôtre aurait séjourné. L’église Sham’ûn al-Safa’ [construite pendant la période atabeg XIIe-XIIIe siècles] serait bâtie sur le lieu habité par Saint Pierre lors d’une visite en Babylonie et l’église de Mâr Théodoros se rattacherait au passage de l’apôtre Barthélémy. Quant à l’apôtre Saint Thomas en route vers l’Inde, la maison où il aurait reçu l’hospitalité devint église[4] ». Cette église est précisément l’édifice syriaque-orthodoxe Mar Touma (objet de cette notice).

La première église attestée à Ninive (aujourd’hui Mossoul-Est) date de l’an 570. On en trouve la trace dans la « Chronique de Séert ». Il s’agit de l’église Mar Isha’ya. De fait cela confirme la préexistence d’une communauté chrétienne. Au VIIe siècle l’église Mar Touma de la communauté syriaque-orthodoxe était également connue. Le monastère Mar Gabriel fut dès le VIIe siècle le siège d’une grande école théologique et liturgique de l’Église de l’Orient. C’est sur l’emplacement de ce couvent que fut édifié au XVIIIe siècle l’église al Tahira des Chaldéens[5].

Au long des siècles, au fur et à mesure des conciles et des conflits s’est constituée à Mossoul une multiplicité d’églises de toutes confessions, y compris arménienne et latine.

Parmi ces fragments d’histoire, citons notamment la conquête musulmane. Mossoul tomba en 641 et ses chrétiens devinrent des dhimmis, soumis aux droits (limités) et devoirs (contraignants) qu’implique leur appartenance confessionnelle. Ce statut perdura jusqu’au XIXe et fut abolit dans l’Empire ottoman en 1855. Malgré cette abolition, la dhimmitude des Chrétiens (et des Juifs) détermine encore aujourd’hui de facto les rapports confessionnels dans la vie publique et dans les mentalités dans presque tous les pays musulmans. Il est encore appliqué de jure (en Iran).

Aux XIIe et XIIIe siècles, en pleine période turque-seldjoukide, les dynastes Atabegs s’imposèrent dans toute la Mésopotamie irakienne et firent de Mossoul un haut lieu de pouvoir. A cette époque les Syriaques-Orthodoxes persécutés à Tikrit s’implantèrent dans la plaine de Ninive ainsi qu’à Mossoul, où ils développèrent leur communauté et fondèrent l’église Mar Ahûdêmmêh (Hûdéni). « A la fin du XXe siècle, à cause de l’inondation des sous-sol du quartier, l’église Mar Hûdéni, située bien en dessous du niveau du sol fut inondée et dut être abandonnée. Une nouvelle fut construite juste au dessus de l’ancienne. On a fort heureusement transporté et mis en évidence dans la nouvelle église la Porte Royale de style atabeg que le père Fiey qualifie de ‘joyau de la sculpture chrétienne du XIIIe siècle’. »[6]

Succédant aux Atabegs, le Mongol Houlagou Khan prit Mossoul mais épargna la cité de la destruction et des massacres qu’il commit à Bagdad en 1258, grâce « au très habile gouverneur de la ville, Lû’lû’, d’origine arménienne[7] ». Le siècle suivant fut néanmoins tragique. « Les persécutions chrétiennes atteignent leur paroxysme sous Tamerlan, dont les armées ravagent le Moyen-Orient dans les premières années du XIVe siècle et y exterminent les populations chrétiennes. Aucune chrétienté orientale n’ayant dû subir une entreprise d’éradication comparable, celle d’Irak peut à bon droit revendiquer la palme du martyre »[8].

En 1516, Mossoul tomba une première fois aux mains des Turcs ottomans, mais c’est au siècle suivant qu’ils établirent durablement et pour 4 siècles leur domination sur la Mésopotamie irakienne après la conquête de Bagdad en  1638 par le sultan Murad IV.

Mossoul au XVIe siècle fut un grand centre de rayonnement chrétien. C’est là  que se déroula le schisme de l’Église de l’Orient, avec l’élection de Yohanès Soulaqa en tant que premier patriarche de l’Église chaldéenne. Supérieur du monastère de Rabban Hormizd d’Alqosh, il prit le nom de Jean VIII et se rendit à Rome pour y faire profession de foi catholique. Le 20 avril 1553, le pape Jules III le proclama patriarche de l’Église chaldéenne catholique « dont la naissance est dès lors officielle [9] ». Après Diyarbakır (sud-est de l’actuelle Turquie) et avant Bagdad (en 1950), c’est à Mossoul, en 1830, que fut établit le siège de l’église chaldéenne, avec l’élection au trône patriarcal du métropolite de Mossoul, Jean VIII Hormez.

En 1743, les chrétiens de Mossoul participèrent activement à la défense de la ville pendant le siège de 42 jours que conduisit le Perse Nâdir Shâh qui avait au préalable pillé et ravagé la plaine de Ninive. Victorieux et reconnaissants le pacha de Mossoul  Husayn Djalîlî, « obtint un firman de Constantinople en faveur des églises de Mossoul[10] ».  En 1744 furent ainsi construites les deux églises al Tahira de Mossoul, l’une pour les Chaldéens, l’autre pour les Syriaques-Catholiques. D’autre part, les églises endommagées par les bombes furent restaurées.

Le XVIIe siècle marqua l’ouverture des missions latines en Mésopotamie irakienne. Les Frères Capucins ouvrirent leur première maison à Mossoul en 1636. Les Dominicains de la Province de Rome arrivèrent en 1750, suivis de ceux de la Province de France en 1859. Sous leur impulsion est construite la grande église latine Notre-Dame de l’Heure, « de style romano-byzantin, entre 1866 et 1873[11] », à qui l’impératrice Eugénie de Montijot, épouse de Napoléon III, offrit en 1880 la célèbre horloge qui fut installée dans le premier clocher-campanile construit sur le sol irakien. Depuis presque trois siècles, les membres de la Mission dominicaine de Mésopotamie, de Kurdistan et d’Arménie sont des acteurs, des experts et des témoins essentiels de l’histoire chrétienne irakienne et des périls auxquels font face les chrétiens du Proche-Orient.

Un point de rupture eût lieu en 1915-1918 lors du génocide des Arméniens et des Assyro-Chaldéens de l’Empire ottoman. Nombre de rescapés s’installèrent en Mésopotamie irakienne et notamment à Mossoul où préexistaient des communautés chrétiennes. Au cours de période, en janvier 1916 en 2 nuits seulement, 15000 déportés arméniens à Mossoul et dans ses environs furent exterminés, attachés 10 par 10, et jetés dans les eaux du Tigre. Déjà, bien avant ce carnage, dès le 10 juin 1915, le consul allemand à Mossoul, Holstein, télégraphia à son ambassadeur des scènes édifiantes: « 614 arméniens (hommes, femmes, enfants) expulsés de Diarbékyr et acheminés sur Mossoul ont tous été abattus en voyage pendant le voyage en radeau (sur le Tigre). Les kelek sont arrivés vides hier. Depuis quelques jours le fleuve charrie des cadavres et des membres humains (…)[12]»

La chute de Saddam Hussein en 2003 et le développement du fondamentaliste islamico-mafieux eurent un impact considérable sur l’effondrement démographique des communautés chrétiennes d’Irak, tout particulièrement à Mossoul. Le 1er août 2004, les attaques simultanées contre 5 églises de  Mossoul et de Bagdad constituèrent le point de départ de l’exode des Chrétiens de Mossoul vers les zones protégées de la plaine de Ninive, vers le Kurdistan d’Irak et vers l’étranger. Les années qui suivirent à Mossoul furent terribles. Les assassinats et kidnappings ciblés des Chrétiens accentuèrent l’exode. Le 6 janvier 2008, jour de l’épiphanie, puis le 9 janvier des actions criminelles visèrent plusieurs édifices chrétiens de Mossoul et de Kirkouk.

C’est dans ce climat terrifiant que fut enlevé Monseigneur Paulos Faraj Rahho, archevêque chaldéen de Mossoul. « Le 13 février 2008, alors qu’il accueillait la  délégation de Pax Christi, dans l’église de Karemlesse, tout près de Mossoul, le prélat révélait avoir été menacé par un groupe terroriste quelques jours plus tôt : – ‘Ta vie ou cinq-cent-mille dollars, lui dirent les terroristes’. – ‘Ma vie ne vaut pas ce prix !’ leur a-t-il répondu. Un mois plus tard, le 13 mars, Monseigneur Rahho était retrouvé mort aux portes de la ville[13]. »

Entre juin 2014 et juillet 2017, Mossoul tomba aux mains des combattants islamistes de daesh. Les quelques 10 000 chrétiens qui résidaient encore dans la cité, virent leurs maisons frappées du signe Nazrani (Nazaréen, c’est à dire disciples de Jésus). Ainsi stigmatisés, ils furent sommés de se convertir à l’islam, de payer la djizia (l’impôt des dhimmis), ou de mourir. Ils fuirent la métropole massivement et en toute hâte, mais durent abandonner  leur patrimoine chrétien qui fut en grande partie pillé, vandalisé et profané. La bataille de Mossoul et les bombardements de la coalition internationale qui écrasèrent les combattants de daesh sous un déluge de feu, réduisirent en poussière certains des plus grands édifices chrétiens (et musulmans) de Mossoul.

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[1] Chapitre fondé en grande partie sur les travaux de Fr. Jean-Marie Mérigoux, o.p. qui vécut 14 ans en Irak, de 1968 à 1983, dans le cadre de la Mission dominicaine de Mésopotamie, de Kurdistan et d’Arménie, dont le centre était à Mossoul. Voir notamment deux des livres de Fr. Jean-Marie Mérigoux : « Va à Ninive ! Un dialogue avec l’Irak », Éditions du Cerf, Octobre 2000 ; et « Entretien sur l’Orient chrétien », Éditions La Thune, Marseille, Juillet 2015.

[2] In « Entretien sur l’Orient chrétien », Jean-Marie Mérigoux. Éditions La Thune, Marseille, 2015, p.88

[3] In « Assyrie Chrétienne », vol.II,  Jean-Maurice Fiey. Beyrouth, 1965. P. 115-116. Voir aussi « Mossoul chrétienne » de Jean-Maurice Fiey.

[4] In « Entretien sur l’Orient chrétien », Jean-Marie Mérigoux. Editions La Thune, Marseille, 2015, p. 89

[5] In « Entretien sur l’Orient chrétien », Jean-Marie Mérigoux. Editions La Thune, Marseille, 2015, p. 92-93

[6] In « Entretien sur l’Orient chrétien », Jean-Marie Mérigoux. Editions La Thune, Marseille, 2015, p. 94

[7] In « Entretien sur l’Orient chrétien », Jean-Marie Mérigoux. Editions La Thune, Marseille, 2015, p. 95

[8] In « Vie et mort des chrétiens d’Orient », Jean-Pierre Valogne, Fayard, Mars 1994, p.740

[9] In « Histoire de l’Église de l’Orient », Raymond Le Coz, Cerf, septembre 1995, p. 328

[10] In « Entretien sur l’Orient chrétien », Jean-Marie Mérigoux. Editions La Thune, Marseille, 2015, p. 97

[11] In « Entretien sur l’Orient chrétien », Jean-Marie Mérigoux. Editions La Thune, Marseille, 2015, p. 102

[12] In « L’extermination des déportés arméniens ottomans dans les camps de concentration de Syrie-Mésopotamie ». N° spécial de la Revue d’Histoire Arménienne Contemporaine, Tome II, 1998. Raymond H.Kevorkian. p.15

[13] In « Chrétiens d’Orient : ombres et lumières », de Pascal Maguesyan, Éditions Thaddée, septembre 2013, réédité janvier 2014, p. 260

Mossoul. La vieille-ville ravagée par la guerre.
Avril 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Mossoul. La vieille-ville ravagée par la guerre.
Avril 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Mossoul. La vieille-ville ravagée par la guerre.
Avril 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Mossoul. La vieille-ville ravagée par la guerre.
Avril 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA

Histoire de l’Eglise Mar Touma de Mossoul

L’église syriaque-orthodoxe Mar Touma de Mossoul est attestée dès le VIIe siècle.  Elle fut un des plus importants sièges de l’archevêché syriaque-orthodoxe de Mossoul et du Nord de l’Irak.

L’édifice aujourd’hui visible au cœur de la vieille ville devait se trouver à l’origine hors des murs primitifs de Mossoul bâtis en 640[1]. Son histoire est d’autant plus complexe qu’elle fut construite par étapes successives aux VIIe, XVIIIe et XIXe siècles. A l’église primitive du VIIe  siècle, s’ajoute sa partie centrale érigée en 1848, dont les inscriptions en syriaque-estrangelo et en arabe[2] indiquent qu’elle fut édifiée sous le patriarcat de Yacoub II. Sa partie méridionale fut construite en 1744 durant l’ère ottomane djalili, 1 an après la déroute du perse Nadir Shah qui échoua à prendre la ville.

« Cette église est aussi un lieu de pèlerinage pour certains chrétiens de l’Inde, ou chrétiens de Saint Thomas, qui viennent vénérer ce lieu où, selon la tradition, saint Thomas est passé en venant chez eux[3] ». Ces pèlerins indiens furent d’autant plus nombreux sous le règne de Saddam Hussein qu’ils comptaient au nombre de travailleurs immigrés en Irak.

« Plusieurs manuscrits témoignent de la vie religieuse intense de Mār Tūmā : le plus ancien qui soit connu est de 1168, nous en trouvons ensuite de 1270 à 1289. En 1272, un nestorien était en possession d’un recueil d’homélies composé par le prêtre-moine de Mār Tūmā  appelé Abū-I-Hayr. En 1590, un copiste Qaracochien termine un manuscrit pour le Chammas  CAbd al-Āzalī, fils du prêtre CAbd al-Ğalil de Mossoul, de la communauté de Mār Tūmā »[4].

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[1] In « Les chrétiens de Mossoul et leurs églises pendant la période ottomane de 1516 à 1815», Fr. Jean-Marie Mérigoux, o.p. Mossoul-Ninive,1983, p.104

[2] Les traductions des inscriptions ont été faites par Fr. Jean-Marie Mérigoux et présentées dans son étude « Les chrétiens de Mossoul et leurs églises pendant la période ottomane de 1516 à 1815», Fr. Jean-Marie Mérigoux, o.p. Mossoul-Ninive,1983, p.108-111

[3] In « Les chrétiens de Mossoul et leurs églises pendant la période ottomane de 1516 à 1815», Fr. Jean-Marie Mérigoux, o.p. Mossoul-Ninive,1983, p.105

[4] In « Les chrétiens de Mossoul et leurs églises pendant la période ottomane de 1516 à 1815», Fr. Jean-Marie Mérigoux, o.p. Mossoul-Ninive,1983, p.105

Église syriaque-orthodoxe Mar Touma de Mossoul. Dédicace burinée par daesh.
Avril 2018 © Etienne Piquet-Gauthier / MESOPOTAMIA
Église syriaque-orthodoxe Mar Touma de Mossoul. Cour intérieure et cimetière.
Avril 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA

Description de l’église syriaque-orthodoxe Mar Touma

Le terrain sur lequel est établi l’église syriaque-orthodoxe Mar Touma de Mossoul est inférieur au niveau de la rue. Ce  vaste terrain est occupé au nord par le vieux cimetière communautaire et de l’autre côté par l’église proprement dite.

On pénètre dans l’église syriaque-orthodoxe Mar Touma par les portes  ouvertes sur les façades nord et ouest.

Plus qu’une église, il s’agit d’un ensemble architectural complexe à 5 nefs constitué de deux voire de trois églises parallèles délimitées par des arches à colonnes octogonales.

L’église côté nord est la plus ancienne. La tradition indique qu’elle aurait été bâtie sur la maison où aurait logé Saint Thomas lors de son passage à Mossoul.  Son architecture est caractéristique de la période dite « atabeg ».  Le niveau de l’église autrefois beaucoup plus bas a été rehaussé progressivement et notamment lors des différentes phases de construction des églises parallèles, c’est pourquoi les piliers octogonaux de l’église ancienne sont presque enterrés dans le sol. C’est dans cette partie de l’église que se trouvèrent jusque tout récemment les reliques de Saint Thomas, « dans une vitrine encastrée dans le mur[1] ». Ces reliques[2] transportées en lieu sûr ont été préservées des destructions.

Ce qui rend cette église ancienne admirable, outre son histoire, c’est sa magnifique porte royale en marbre de Mossoul, dont l’encadrement est sculpté de bas-reliefs représentant les douze apôtres entourant le Christ. Cette frise, aux motifs et portraits entrelacés et dont les visages avaient une apparence asiatique, a été dégradée par les assaillants iconoclastes de daesh. Tous les visages ont été  burinés. Cette porte royale fut reculée de quelques mètres en 1848 pour être alignée sur le sanctuaire de la nouvelle église Mar Touma, jumelée à l’ancienne sur son côté sud. Sur le pilier gauche contre lequel était autrefois adossée cette porte royale se trouve aujourd’hui les reliques de Mar Théodoros. Elles « furent installées solennellement au XVIIe siècle dans le pilier de la porte des douze apôtres et présentées à la dévotion des fidèles[3] ».

Cette nouvelle église, centrale, construite en 1848, est aujourd’hui la principale avec sa triple nef et son sanctuaire devant lequel est érigée une porte à triple entrée.  Le style ornemental de la nouvelle église imite celui de l’ancienne. Les colonnes y sont également octogonales. Le maître-autel du sanctuaire daté lui-aussi de 1848 y a été dynamité par daesh.

En progressant encore vers le sud à l’intérieur de l’édifice, on atteint la troisième église jumelée. Dédiée à Mar Behnam, elle est datée du 1744 et correspond à l’époque dynastique « djalili » de la cité. On y trouve au bout de la nef unique, près de l’entrée sud-ouest, de nombreuses pierres tombales d’évêques syriaques-orthodoxes mossouliotes, en langue syriaque-estrangelo et garsuni[4].

La continuité et l’unité de cet ensemble architectural tripartite sont assurées par le sanctuaire qui s’étire sans séparation du nord vers le sud. Au total, 8 portes saintes séparent la quintuple nef du sanctuaire.

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[1] In « Entretien sur l’Orient chrétien », Jean-Marie Mérigoux. Éditions La Thune, Marseille, 2015,

[2] Ces reliques étaient tenues pour véritables par Jean-Maurice Fiey, connu pour être un orientaliste à l’esprit critique aiguisé.

[3] In « Les chrétiens de Mossoul et leurs églises pendant la période ottomane de 1516 à 1815», Fr. Jean-Marie Mérigoux, o.p. Mossoul-Ninive,1983, p.108

[4] Traductions in « Les chrétiens de Mossoul et leurs églises pendant la période ottomane de 1516 à 1815», Fr. Jean-Marie Mérigoux, o.p. Mossoul-Ninive,1983, p.108-111

Église syriaque-orthodoxe Mar Touma de Mossoul. Entrées et façade nord.
Avril 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Église syriaque-orthodoxe Mar Touma de Mossoul. Entrée nord vue de l'intérieur.
Avril 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Église syriaque-orthodoxe Mar Touma de Mossoul. Nef de 1848 et porte royale de 1648.
Avril 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Église syriaque-orthodoxe Mar Touma de Mossoul. Façade ouest, vue intérieure.
Avril 2018 © Etienne Piquet-Gauthier / MESOPOTAMIA
Église syriaque-orthodoxe Mar Touma de Mossoul. Vue générale intérieure sur le sud-ouest.
Avril 2018 © Etienne Piquet-Gauthier / MESOPOTAMIA
Église syriaque-orthodoxe Mar Touma de Mossoul. Porte des douze apôtres. Les visages ont été burinés par daesh. L'autel du sanctuaire a été détruit.
Avril 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Église syriaque-orthodoxe Mar Touma de Mossoul. Porte royale, partie centrale. Les visages ont été burinés par daesh. Le maître-autel a été détruit.
Avril 2018 © Etienne Piquet-Gauthier / MESOPOTAMIA
Église syriaque-orthodoxe Mar Touma de Mossoul. Porte royale, partie gauche. Les visages ont été burinés par daesh. L'autel du sanctuaire a été détruit.
Avril 2018 © Etienne Piquet-Gauthier / MESOPOTAMIA
Église syriaque-orthodoxe Mar Touma de Mossoul. Stèles funéraires.
Avril 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA

Documentaire radio de RCF sur Mossoul :

  • Histoire et découverte des deux églises Mar Touma (syriaque-orthodoxe et syriaque-catholique).
  • Entretien avec Abouna Pios Affas, curé syriaque-catholique de Mar Touma.
  • Un avenir à réinventer

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